Percer les secrets des séismes à l’aide de ballons stratosphériques
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• Une équipe de chercheurs du DEOS a franchi une étape significative dans l’utilisation des données infrasonores captées par des ballons stratosphériques pour la compréhension des signaux sismiques.
• Cette avancée, publiée dans Earth Planets Space*, ouvre de nouvelles perspectives pour l’étude des séismes, tant sur la Terre que sur d’autres planètes.
Une nouvelle approche pour étudier les séismes depuis la stratosphère
Une équipe de chercheurs, dirigée par Solène Gerier, docteure en sciences de la Terre et des planètes solides, ingénieure en mathématiques appliquées et post-doctorante à l’ISAE-SUAPERO, a franchi une étape importante dans l’analyse des séismes. Leur étude porte sur l’analyse des ondes acoustiques générées par les séismes à l’aide d’une méthode de captation innovante pour l’objet d’étude. Les ondes ont en effet été enregistrées dans la stratosphère grâce à des capteurs de pression installés sur des ballons à haute altitude. Cette nouvelle approche permet d’étudier les séismes en analysant les signaux infrasonores qu’ils émettent à travers l’atmosphère.

Elle s’appuie sur les travaux précurseurs de Raphaël Garcia, enseignant-chercheur à l’ISAE-SUPAERO, spécialiste en sismologie spatiale et planétaire. En 2022, avec son équipe, ils avaient démontré dans Geophysical Research Letter la faisabilité de telles observations lors de la mission Stratéole-2 du CNES en collaboration avec le Laboratoire de Météorologie Dynamique. L’avancée proposée par Solène Gerier permet de remonter à la source sismique de ces signaux, analysant uniquement les contributions acoustiques dans l’atmosphère.
Une modélisation complexe pour décrypter les signaux
Pour démêler l’écheveau des différentes composantes des signaux enregistrés, la scientifique et son équipe ont développé une modélisation sophistiquée. Celle-ci intègre non seulement le tracé des rayons infrasonores, mais également l’analyse du bruit de fond et la réponse des "plateformes ballons". Une analyse complémentaire a été menée afin de mieux comprendre l’origine des signaux, faisant intervenir notamment la technique du tracé de rayons infrasonores mais également une analyse du bruit lié aux mouvements de plateforme ballon.
Les simulations, réalisées grâce au logiciel SPECFEM2D-DG-LNS, ont révélé que la signature des ondes était principalement influencée par les caractéristiques du séisme et la structure interne terrestre, et non par les conditions atmosphériques. « Les vibrations du sol produisent des ondes acoustiques que l’on peut détecter dans l’atmosphère. Ces ondes ont une signature particulière car elles ont été produites par les ondes sismiques, elles-mêmes caractéristiques du séisme et de la nature du sol dans lequel ces ondes se propagent. » précise Solène Gerier. « La modélisation nous a permis de vérifier que ces caractéristiques se conservent jusque dans l’atmosphère. »
Des résultats prometteurs
Si les simulations n’ont pas permis de reproduire avec exactitude la forme des ondes observées dans la bande de fréquence de 0,05 à 0,3 Hz, elles ont néanmoins mis en évidence des phénomènes intéressants. Les chercheurs ont notamment observé une dispersion des ondes de surface sismiques dans les enregistrements de pression. Les oscillations prolongées constatées après le signal principal s’expliquent en partie par les mouvements verticaux complexes du sol et par les réflexions multiples des infrasons sur la topographie.
Au-delà de son application terrestre, cette méthodologie pourrait s’avérer particulièrement précieuse pour l’exploration d’autres planètes, ainsi que le souligne Raphaël Garcia : "Ces plateformes sont intéressantes pour les planètes sur lesquelles on ne peut pas déployer de sismomètre à la surface à cause d’une atmosphère trop chaude. C’est en particulier le cas pour la planète Vénus (450°C à la surface) pour laquelle on pense que la détection de séismes se fera dans le futur au travers des perturbations atmosphériques qu’ils engendrent."
Cette étude, qui s’inscrit dans la continuité des recherches menées par l’équipe de DEOS/SSPA de l’Institut, démontre le potentiel considérable des plateformes aéroportées pour l’étude des séismes, tant sur la Terre que sur d’autres planètes.
Pour consulter la publication scientifique : https://earth-planets-space.springe...
Solène Gerier, docteure en sciences de la Terre et des planètes solides, ingénieure en mathématiques appliquées et post-doctorante à l’ISAE-SUPAERO, s’intéresse à divers aspects de l’atmosphère terrestre parmi lesquels :
> la modélisation des ondes acoustiques produites par des aléas naturels (séismes, éruptions volcaniques)
> la détection des perturbations induites dans la stratosphère ou l’ionosphère
> les particularités et modèles atmosphériques