L’ISAE-SUPAERO publie son Référentiel Aviation et Climat
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Peut-on caractériser l’impact de l’aviation sur le climat ?
Peut-on comparer les effets CO2 et les effets non CO2 ?
Quelles sont les solutions technologiques étudiées de nos jours pour rendre l’aviation durable ?
Peut-on relier la vitesse d’évolution du trafic aérien à la part du budget carbone consacrée à l’aviation ?
Peut-on faire un bilan des ressources énergétiques disponibles ?
Ces questions ont motivé l’écriture d’un rapport de référence au sein de l’ISAE-SUPAERO.
L’objectif de ces travaux n’est pas de prendre parti ni de répondre aux différentes questions évoquées, car les réponses dépendent en grande partie de choix de société et d’évolutions technoéconomiques impossibles à prédire avec certitude.
En revanche, l’objectif de ce rapport est de fournir à chacun, à partir de notre position de scientifiques, les éléments nécessaires à la construction d’opinions éclairées sur ces questions, aussi objectivement que possible. Par effet d’entraînement, nous espérons aussi via ce rapport susciter des débats et ainsi participer à l’émergence d’un positionnement collectif sur ces enjeux cruciaux.
Messages clés du référentiel Aviation et Climat
Le référentiel Aviation et Climat de l’ISAE-SUPAERO a pour vocation de fournir des éléments scientifiques utiles à la compréhension des enjeux aviation et climat. Ces travaux ont été soumis à un processus de relecture spécifique, intégrant à la fois du personnel de l’ISAE-SUPAERO et des chercheurs extérieurs issus de différents instituts.
Impact climatique de l’aviation : des estimations qui dépendent du périmètre
L’aviation contribue à l’accentuation du réchauffement climatique via ses émissions de CO2 et plusieurs effets non-CO2 comme les traînées de condensation. L’évaluation de l’impact du secteur aérien peut se limiter aux seules émissions de CO2, ou bien considérer l’ensemble des effets. Dans le premier cas, l’aviation commerciale a été responsable de 2,6 % des émissions anthropiques mondiales de CO2 en 2018. Si l’on considère l’ensemble des effets (CO2 et non-CO2), l’aviation commerciale a représenté 5,1 % de l’impact climatique sur la période 2000-2018.
Effets non-CO2 : des stratégies prometteuses
Les stratégies spécifiques de réduction des effets non-CO2 représentent un levier majeur pour limiter l’impact climatique de l’aviation. En raison de la courte durée de vie des effets non-CO2, ces stratégies peuvent être efficaces rapidement. Même si des travaux de recherche sont encore nécessaires pour réduire les incertitudes, ces stratégies pourraient être déployables à brève échéance. Néanmoins, ces mesures ne peuvent pas se substituer aux efforts de réduction des émissions de CO2 du secteur.
Effets CO2 : des opportunités technologiques limitées à court terme
D’ici 2050, des solutions de rupture permettent d’envisager un avion bas-carbone. À plus court terme, pour diminuer les émissions de CO2 dans les délais impartis par l’urgence climatique, les seuls leviers matures sont les améliorations incrémentales de l’efficacité des avions et l’utilisation des biocarburants. Néanmoins, les améliorations incrémentales sont en passe d’atteindre des limites technologiques, alors que les contraintes de disponibilité énergétique, de capacité de production et de concurrence sur les usages risquent de limiter la disponibilité des biocarburants.
Un arbitrage nécessaire entre le niveau de trafic et la part du budget carbone mondial allouée au secteur aérien
Hormis les leviers technologiques et opérationnels, le niveau de trafic et la part du budget carbone mondial allouée à l’aviation sont les deux paramètres qui déterminent la durabilité d’une trajectoire pour le secteur aérien. Leur valeur doit être fixée par des décisions d’ordre politique. Les limites sur la capacité du secteur aérien à diminuer rapidement ses émissions de CO2 impliquent que, si le trafic croît au rythme envisagé par l’industrie aéronautique, alors il consommera une part plus importante du budget carbone que sa part actuelle des émissions, nécessitant ainsi que d’autres secteurs d’activité réduisent leurs émissions plus rapidement que la moyenne.
Des incertitudes sur la disponibilité énergétique
La décarbonation des carburants pour l’aviation pourrait être limitée par la disponibilité en ressources énergétiques bas-carbone. Leur utilisation massive pourrait alors entraîner un déplacement de problème environnemental, notamment lié à l’usage des sols. De façon générale, il est nécessaire de penser la transition du secteur aérien de manière systémique dans le cadre des limites planétaires.