Rencontre avec Marwan Lahoud (S1989), nommé président du Conseil d’administration de l’ISAE-SUPAERO le 28 août 2023
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Marwan Lahoud a été nommé président du conseil d’administration de l’ISAE-SUPAERO le 28 août 2023. Il est aussi directeur général délégué de Tikehau Investment Management et président de l’activité Private Equity de Tikehau Capital Il suit plus particulièrement les stratégies cybersécurité et aéronautique. Il a précédemment occupé les fonctions de Directeur général délégué à la stratégie et à l’international chez Airbus de 2007 à février 2017. Avant de rejoindre le groupe Airbus, Marwan Lahoud a été Président directeur général de la société MBDA (missiles et systèmes de missiles) de 2003 à 2007.
Vous êtes, depuis le 28 août dernier, à la tête du Conseil d’administration de l’ISAE-SUPAERO, dont vous avez été diplômé en 1989. Pourquoi avez-vous accepté ce mandat ? Quelles sont vos ambitions pour l’école ?
Marwan Lahoud : M’impliquer dans les instances de l’école est une manière de rendre un peu de ce que l’Institut m’a donné. J’y ai appris mon métier, et grâce à lui j’ai eu mes premières expériences dans l’aéronautique.
L’aéronautique et le spatial sont en pleine révolution, il faut plus que jamais attirer les talents vers ces domaines. Notre mission est de faire en sorte que les jeunes femmes et les jeunes hommes qui ont une appétence pour les sciences et la technologie soient enchantés et rêvent d’avion - comme moi quand j’avais leur âge !
En tant que président du conseil d’administration, mes missions sont de piloter la gouvernance de l’école, de participer et de faciliter la définition d’une stratégie et d’aider la direction dans son exécution. Il n’y a pas de stratégie qui vaille s’il n’y a pas de moyens associés. Nous avons le soutien sans faille du ministère des Armées et de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, mais la levée des fonds privés est essentielle et je regarderai en priorité ces aspects.
L’ISAE-SUPAERO est historiquement très lié à l’industrie aéronautique et spatiale française et lui a fourni ses grands pionniers et leaders. Le rayonnement mondial de l’école et de l’aérospatiale française sont étroitement liés et c’est certainement ce modèle « d’ingénieur à la française » appliqué à des domaines aussi exigeants, qui positionne aujourd’hui l’ISAE-SUPAERO parmi les quelques établissements d’enseignement supérieur et de recherche français dont la reconnaissance dépasse largement nos frontières. Aujourd’hui encore, l’ISAE-SUPAERO irrigue, par ses travaux et ses talents, l’industrie et la recherche aéronautique et spatiale non seulement françaises mais aussi européennes.
Les piliers de l’Institut sont la formation, la recherche, et l’innovation : quels sont les défis majeurs de l’école dans chacun de ces domaines, pour accompagner les transformations du secteur ?
M. L. : Nous avons pour ambition d’être le premier institut de formation aérospatiale au monde et d’attirer les meilleurs étudiants des 5 continents. Il faut pour cela que la formation soit au meilleur niveau mondial. Nous avons un personnel enseignant de très grande qualité, il faut lui donner les moyens de se maintenir au niveau d’excellence qui fait la réputation de l’école.
Concernant la recherche, j’ai pu constater le haut niveau de la production scientifique propre à l’ISAE-SUPAERO. Il faut la développer et l’accentuer, car on ne conçoit pas une formation au meilleur niveau mondial sans une recherche de même qualité. Les deux sont intimement connectées.
Sur le dernier pilier, j’ai été non seulement séduit par tout ce qui gravite autour de l’entrepreneuriat et de l’innovation, mais aussi par les encouragements que reçoivent les étudiants de la part des professeurs et de tout l’écosystème de l’école pour lancer des projets innovants et des start-up. Il faut continuer à leur offrir cet environnement favorable. Notre notoriété doit être un accélérateur et un facilitateur pour ces jeunes pousses prometteuses afin de trouver des fonds, des soutiens et des marchés.
Quels sont selon vous, les atouts d’un diplômé de l’ISAE-SUPAERO pour faire face aux grands défis de l’industrie et de la société de demain ? L’ingénieur a-t-il un rôle particulier à jouer ?
M. L. : Nous assistons aujourd’hui à une mutation des enjeux de notre société moderne qui remet l’ingénieur au centre de cette évolution. Après une période tournée vers le tout management ou le tout gestion, lorsqu’il s’agit de décarboner, numériser ou reprendre l’exploration et la conquête spatiale, c’est la science et le développement technologique qui reviennent sur le devant de la scène. L’ingénieur a entre ses mains les clés pour relever ces défis.
Prenons l’exemple de la décarbonation. Les ingénieurs de l’ISAE-SUPAERO ont naturellement un grand rôle à jouer dans cette révolution. En dépit des changements de comportement et d’implémentation de mesure de sobriété, la demande de voyages aériens ne va pas cesser d’augmenter, en particulier dans les zones hors Europe. Parce qu’il a les moyens de concevoir l’avion décarboné de demain, l’ingénieur ISAE-SUPAERO a une responsabilité historique pour la planète et pour la société.
Pourriez-vous nous parler de votre parcours professionnel et des raisons qui ont guidé vos choix ?
M. L. : J’ai commencé comme ingénieur d’essais au Centre d’Essais des Landes au sein de la DGA, un poste avec une forte dimension technique. Si j’ai un conseil à donner aux jeunes diplômés et étudiants, c’est de ne pas être trop pressé de faire du management. Les plus belles années de ma vie professionnelle ont été consacrées à la technique et à regarder des objets voler !
J’ai ensuite pris des fonctions au sein de l’Etat pour basculer plus tard dans la construction aéronautique, car je craignais de devenir un technocrate et je voulais revenir aux sources. J’ai ainsi intégré AIRBUS (anciennement Aérospatiale, Matra et EADS). En 2017, j’ai décidé de faire évoluer mon métier, et j’ai rejoint Tikehau Capital pour travailler au financement de l’industrie aérospatiale. Nous sommes aujourd’hui un des premiers investisseurs dans ce domaine.
Quel est votre meilleur souvenir de l’ISAE-SUPAERO ?
M. L. : J’en retiendrai deux : les amitiés nouées et la vie associative. J’étais ingénieur de l’armement et ne logeais pas sur le campus. Cela ne m’a pas empêché d’avoir, en plus d’une vie académique riche, une vie sociale bien remplie. Je passais beaucoup de temps dans les résidences et au foyer, et j’ai, dès la première semaine, été embarqué dans l’équipe de rugby. Nous avons participé à des rencontres sportives dans toute la Région, et voyagé en Angleterre, en Irlande et en Ecosse : j’en garde des souvenirs impérissables. Je ne serais pas complet sans saluer notre inspecteur des études de troisième année et entraîneur de rugby Joël Daste, avec qui j’ai gardé des liens jusqu’à ce jour. Les amis de l’époque sont encore les amis d’aujourd’hui. Parmi eux, je citerai volontiers Valérie Guillemet, DRH de Dassault Aviation, qui a également rejoint récemment le conseil d’administration de l’école.